IMPRESSIONS GENERALES
Les étapes de Burgos à Astorga via LEON
(environ 9 étapes) se déroulent dans un paysage morne
, monotone et triste d'immenses plaines à blé et céréales,
coupés en cette saison et de couleur grise. Aucun paysan dans
les champs, aucun bruit, aucun animal. Chemin rectiligne et quasiment
plat, mais hélas plutôt caillouteux que sableux. Un jour
ou deux à ce régime, c'est supportable, mais sur cette
distance (environ 240 kms) cela devient pour moi un cauchemar : je déteste
ce style de cheminement. Certains y trouvent leur plaisir : rythme régulier
sans montées ni descente ( ou au mieux quelques faibles dénivelés),
on peut en profiter pour s'intérioriser ou faire le vide total
dans ses pensées ; d'autres en profiteront pour faire un "exploit"
sportif, en allongeant les étapes jusqu'à 10 heures de
marche et 40 kms dans la journée.
Partis le même jour (Lundi 18 ), nous de BURGOS,
et nos amis (le couple GROSEIL) de FROMISTA, nous avions 3 étapes
à rattraper pour pouvoir les rejoindre avant SANTIAGO. ce qui
fait que nous avons allongé les premières étapes
bien au delà de notre règle prudente de 20 kms moyens,
jusqu'à 35 kms. Le résultat a été pour moi
catastrophique : un échauffement sous le gros orteil gauche,
mal soigné, qui s'est propagé en énorme ampoule
("CLOQUE" disent les canadiens) , et quelques autres incidents
sur les autres doigts de pied, nous ont contraint d'une part à
ralentir, d'autre part à utiliser les BUS sur quelques portions
peu intéressantes ( en particulier l'interminable sortie dans
la banlieue de LEON).
A l'opposé, les 230 derniers kms, en GALICE et
à son approche, ont été pour nous un véritable
plaisir, hélas atténué par la pluie omniprésente.
On dit que la GALICE ressemble à la BRETAGNE : paysages verdoyants,
mais aussi pluie fréquente ! Forêts de Chênes, puis
ensuite d'Eucalyptus , beaucoup de CHATAIGNIERS majestueux dont certains
au tronc énorme (voir photos), NOYERS à profusion. Tous
au long du chemin, en cette fin Septembre, vous marchez sur des tapis
de noix , de glans, ou de chataignes qui jonchent le sol. Le paysage
se peuple de collines, de haies et de prairies, ou paissent de superbes
vaches blondes ( ressemblant à la race de l'Aubrac). Vous traversez
très souvent de petits villages "bouseux" (il y passe
plus de vaches que de pélerins), aux maisons pauvres en granit
brut et couverts d'ardoises, aux paysannes vétues d'un tablier
à carreaux bleus. Enfin, le chemin ressemble plus à un
sentier qu'à une autoroute pour piétons et cyclistes (comme
c'était le cas autour de LEON). Il se faufile entre des haies
d'arbres, ou des murets de pierres, il monte, descend , passe des gués
sur de nombreux ruisseaux, est rarement rectiligne. Par deux fois, on
monte vraiment dans les nuages et la brume, une fois à la CRUZ
DE FERRO (1100m), et ensuite au fameux O-CEBREIRO (1300m). Et enfin,
on approche du mythique objectif : SANTIAGO et sa cathédrale
! Ou l'idéal est d'être présent le Dimanche pour
assister à la messe principale de 12h dite Messe des Pélerins,
avec tout son décorum et son célèbre lançé
de l'ENCENSOIR, mais aussi beaucoup de ferveur et une foule immense
(pour avoir une place assise, arrivez 1/2 heure avant).
Mais attention : Adeptes du soleil et adversaires de
la pluie : s'abstenir ! Il y pleut la nuit (souvent beaucoup), mais
aussi l'après-midi, avec un petit crachin le matin, mais aussi
des journées complètes avec un peu de malchance. J'ignore
si nous sommes tombés sur une période représentative
du climat en Galice, ou sur une semaine calamiteuse, mais j'estime avoir
bien été arrosé !
Pour peu que vous sortiez du classique "menu du
Pélerin" , vous y trouverez aussi quelques nouveautés
culinaires et gastronomiques : POULPE et MORUE entre autres.
Progressivement, le lever du jour devient de plus en
plus tardif , d'une part à cause de la saison (début de l'Automne),
d'autre part car on avance vers l'Ouest ce qui cause un décalage solaire
avec l'heure légale. Marcher dès 7H du matin relève de l'exploit car
il faut trouver son chemin à la lampe de poche. En Galice, il fait quasiment
encore nuit vers 8h du matin. Il est donc conseillé de repérer le départ
du chemin la veille, afin de ne pas tatonner et risquer de se tromper
le lendemain si l'on part assez tôt !
Comme déja dit dans la 1-ère partie, il
y a quelques aspects décevants en Espagne :
-
les espagnols ne parlent que l'Espagnol ( ou la
langue régionale, Basque en Navarre, Galicien en Galice,
d'ailleurs cela se repère sur les panneaux signalétiques
et les distributeurs bancaires) ; ils ne connaissent ni le français,
ni l'Anglais, ce qui est ubuesque dans une zone ou passent autant
de pélerins étrangers. De plus ils s'énervent
et palabrent à toute vitesse quand on leur signifie qu'on
ne les comprend pas.
-
les églises, mais aussi d'autres monuments,
ont des heures d'ouvertures très limités, vous aurez
rarement la chance de passer dans un village ou ville dont l'église
est ouverte, et tant pis vous ne pourrez pas contempler Christ,
statue de St-Jacques et autres merveilles que vante votre guide
touristique. Y compris à Santiago, méfiance, plusieurs
musées y étaient fermés le Dimanche...
-
si vous aimez les FRITES à chaque repas,
vous serez ravis ; sinon, impossible de se faire servir d'autres
légumes ( même de la purée, ils ne connaissent
pas) avec le plat principal dans le "MENU PELERIN" dont
le prix va de 7,50 euros à 10 euros, au mieux on arrive à
remplacer la poignée de frites par 3 feuilles de salade.Vous
en aurez vite marre des frites , et des viandes souvent frites dans
de la panure, et vous rêverez de plats plus sains et moins
gras.
Inversement, vous serez surpris par les distributeurs
de billets, qui vous proposent d'emblée 4 à 6 langues
: Espagnol, Basque, Galicien, Anglais, Francais, Allemand ... Voila
une vraie intélligence, que l'on ne voit jamais en FRANCE (si
vous en connaissez, dites le moi). Les BUS sont deux fois moins cher
qu'en France, un trajet de 10kms ne vous coutera que 1 euro, les 110
kms jusqu'au Cap Finistère que 20 euros Aller-Retour. Votre budget
en Espagne sera autour de 20 € par jour si vous vous contentez
du confort spartiate des "Refuges" ou "Albergues"
publiques ou privées (et quelquefois à la limite du minimum
sanitaire et hygiène).
le pire qui peut vous arriver , c'est :
* Attraper des PUNAISES dans l'un de ces refuges, et
si vous êtes sensibles comme mon épouse, vous allez avoir
la peau tuméfiée de piqures et ça gratte pendant
des jours et des jours. Hélas, des pélerins sans aucune
conscience collective, transportent leurs bestioles de gite en gite,
et infectent progressivement tout le chemin. Car éradiquer ces
minuscules bestioles de tout votre linge est un travail méticuleux.
* vous faire VOLER , argent, C.B. , papiers d'identité
; ce drame est arrivé à une Canadienne (vol dans l'autobus
alors qu'elle somnolait) et elle a perdu 15 jours pour aller à
son ambassade à Madrid pour se faire refaire passeport , etc
... D'autres pélerins se sont fait voler en laissant négligeamment
leur "banane" sur leur lit dans le refuge. Soyez vigilants
et prudents, il circule maintenant de FAUX pélerins sur le chemin,
qui couchent comme vous dans les refuges (surtout les "donativo",
ça ne leur coute rien) et qui subtilisent tout ce qui traine
avec négligence et sans surveillance, et qui a une valeur.
Pour la fréquentation du chemin, il y avait pas
mal de monde les premiers jours (disons du 18 au 28 septembre), et comme
au mois de mai, il valait mieux arriver tôt pour avoir une bonne
place dans les refuges. Mais sur la deuxième moitié (29/09
au 10/10) j'ai senti une baisse de fréquentation très
nette. Par contre à SANTIAGO, je conseille de préparer
son lieu de nuitée, et de réserver, à moins que
vous ne préfériez vous faire "raccoler" sur
la place de la cathédrale par un gîteur "au noir".
Car SANTIAGO n'est pas, hélas, seulement le but de pélerins
à pied, vous y croiserez une myriade de touristes de tout age
et toutes nationalités, surtout Espagnols et Portugais, qui raflent
la plupart des places dans les hotels et pensions.
Autre détail, surveillez la consommation de votre
Téléphone Portable : car si un ami vous appelle depuis
la France, il va payer une partie de la communication, mais vous vous
en payez aussi une bonne moitié (la partie "espagnole")
; quelle ne fut pas notre surprise de constater, le soir du 1er Octobre
que notre réserve était passée de 48 minutes à
21 minutes, simplement pace que deux de nos enfants nous avaient téléphoné
!
Pour réserver chambres, pensions, refuges PRIVéS,
si vous parlez un peu espagnol, les cabines publiques sont très
pratiques en Espagne, car elles fonctionnent toutes avec des PIECES
DE MONNAIE : 20 - 40 ou 50 centimes suffisent pour passer une communication,
cela évite de consommer à toute vitesse votre forfait.
Au final, vous ne conserverez peut-être comme principal
souvenir que les RENCONTRES merveilleuses, ou simplement enrichissantes
et sympathiques, avec d'autres pélerins : pour moi la palme vient
aux CANADIENS QUEBECOIS, des gens au charme désuet de la vieille
France telle que je l'imagine, rarement fats et prétentieux comme
peuvent l'être d'autres pélerins ( surtout ceux qui ne
parlent que de leurs exploits et des Kilomètres parcourus) ;
mais aussi aux ALLEMANDS , ceux que j'ai rencontrés ayant une
intime conviction religieuse, allant de pair avec une grande élégance
, une douceur et parlant FRANCAIS souvent ( faisons nous autant d'effort
en France pour parler Allemand ?) , et une HONGROISE très attachante.
Inversement, nous sommes horrifiés par cette quantité
inquiétante de pélerins , la plupart Espagnols, qui FUMENT
la cigarette au moindre arrêt, ou le soir sur le seuil du refuge
ou pire dans le jardin ou la cour, et par tous ces fumeurs et FUMEUSES
que vous trouvez dans les bars et restaurants, la plupart affichant
"Si permitar de fumare" (ici il est permis de fumer). A ce
rythme, je prédis que la moitié de la population espagnole
va mourrir d'un cancer de la gorge ou des poumons.
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